Bovins du Québec, octobre 1999, p. 16

Vaches de boucherie

Réduire les rejets en azote et en phosphore?

Dany Cinq-Mars*

Au Québec, les vaches de boucherie se nourrissent presqu’exclusivement de fourrages. Très peu de concentrés leur sont nécessaires. Alors, comment peut-on réduire les rejets en azote et en phosphore de ces animaux? Pour y répondre, regardons chacune des phases de production d’une vache de boucherie et de son veau.

La gestation

Pendant la période de gestation, la vache est tarie. Les besoins en protéine alimentaire sont faibles soit près de 10 % de la matière sèche ingérée. Les besoins en énergie sont similaires à ceux de l’entretien d’un animal adulte. Ainsi, l’utilisation d’un foin à prédominance de graminées récoltées à un stade épiaison contiendra généralement assez d’énergie et de protéine pour rencontrer les exigences nutritionnelles de cette phase. On cherchera à ne pas apporter aux vaches plus de protéines, ou d’azote, qu’elles ont besoin car autrement, le surplus est rejeté dans l’environnement.

Fin de la gestation

Cette période comprend le dernier tiers de la gestation. Les exigences nutritionnelles en énergie et en protéine augmentent. L’utilisation d’un fourrage de graminées récoltées à un stade moins avancé (environ 36 % ADF) suffit généralement. Si un tel fourrage ne se retrouve pas sur l’exploitation, il demeure possible de supplémenter un fourrage plus pauvre avec de l’orge par exemple. Les quantités nécessaires restent toutefois modestes.

Si cette phase se produit alors que les animaux sont au pâturage, il est probable que les exigences en azote soient largement rencontrées. Les excès d’azote sont alors rejetés par l’urine. Or, pendant cette saison de croissance végétative, un pâturage bien géré voit cet azote récupéré immédiatement par le sol. Il sert à fertiliser à nouveau les plantes qui y poussent. Un pâturage bien géré compte suffisamment d’animaux pour brouter rapidement la végétation qui s’y trouve. Ceci réduit les refus et permet de répartir les fumiers uniformément sur la parcelle.

L’allaitement

La troisième phase de production débute avec la naissance du veau et se termine à son sevrage. Si cette période se produit au pâturage, on optimise les exigences nutritionnelles des animaux avec les nutriments présents dans les plantes broutées. C’est à cette période que les besoins nutritionnels des animaux en énergie et en protéines plafonnent. L’utilisation intensive des pâturages permet aux animaux d’obtenir tous les nutriments dont ils ont besoin avec un minimum de supplémentation. Ces pâturages contiennent généralement plus de protéines qu’il n’en faut pour la vache et son veau. Cette situation ne pose pas de problèmes pour l’environnement car de tels pâturages absorbent les fertilisants rapidement. Les pertes dans l’environnement demeurent donc négligeables.

Par contre, si cette phase se produit pendant la saison hivernale, il faudra faire appel soit à du fourrage récolté de valeur nutritive élevée ou soit à l’utilisation de grains pour supplémenter un fourrage de plus faible valeur nutritive. Pour réduire les rejets azotés, il faut éviter d’apporter des surplus de protéines dans les aliments. Cette pratique n’est toutefois pas toujours possible. En effet, il arrive souvent que des fourrages de haute valeur énergétique contiennent également un surplus de protéine. Ainsi, tout surplus d’azote en hiver se retrouve rejeté dans le fumier. On reconnaît qu’au moins 50 % de ce surplus demeure dans le fumier. L’autre 50 % se volatilise sous forme d’ammoniac et est une source de pollution de l’air.

Le tableau 1 illustre un exemple de fourrages. Toutefois, il peut être difficile de produire des fourrages rencontrant les exigences en énergie et en protéine sans les dépasser. Un dépassement de 4 % de protéines alimentaires provoquera une hausse de 4 % des rejets en azote.

Or, sur une base strictement environnementale et compte tenu des difficultés rencontrées pour restreindre les pertes azotées durant l’hiver, il faut recommander des vêlages de printemps associés à une gestion intensive des pâturages.

Le phosphore

On sait que les microbes du rumen possèdent la capacité de transformer le phosphore des produits végétaux en phosphore disponible pour les animaux. La seule façon de réduire les rejets en phosphore consiste en la formulation de régimes alimentaires rencontrant les exigences nutritionnelles pour ce minéral tout en évitant les excès. Pratiquement, on s’assurera de ne pas introduire inutilement des ingrédients contenant de forts taux de phosphore si ce dernier n’est pas requis. Par exemple, on choisira du minéral sans phosphore si la ration n’en nécessite pas. De plus, cette pratique aidera à formuler des rations plus économiques car le phosphore est un minéral dispendieux.

* : agronome, pH. D., Direction des services technologiques, MAPAQ

Tiré d’une conférence : " Le potentiel de réduction des rejets en azote et en phosphore chez les bovins de boucherie ", donnée dans le cadre d’Agri-vision Montérégie, mardi, 8 décembre 1998 à Saint-Hyacinthe.